La règle N°1 d'écriture ?

La règle N°1 d'écriture ?

Aujourd’hui je veux vous parler du Show don’t tell (“Montre, ne dis pas”). C’est une règle bien connue en écriture, mais plus subtile qu’elle n’y paraît. Quand on écrit une histoire, on dit toujours les choses, on ne peut pas faire autrement à moins de se mettre à dessiner entre les lignes. La question est: qu’est-ce qu’on dit, et comment ? Le Show don’t tell est une recette ultra efficace pour y répondre. Mais qu’est-ce que c’est donc ?

LE GENIAL SHOW DON’T TELL

Comme je le vois, le Show Don’t Tell a deux objectifs principaux :

  • Factuel : dire les choses de manière détournée pour que le lecteur reçoive l’information qu’on veut lui transmettre sans qu’il n’ait l’impression d’avoir reçu une explication. En somme, c’est noyer l’information dans une énigme: c’est plus agréable d’avoir résolu soi-même une énigme (même facile) que de recevoir un cours.

  • Émotionnel : offrir au lecteur une expérience de lecture capable de lui transmettre une émotion, plutôt que de lui dire de façon explicite quelle émotion il est censé ressentir.

En conséquence, la grande majorité du temps, ça prend beaucoup plus de mots que de simplement dire, mais si c’est bien fait, ça vaut le coup. Tellement, que j’ai eu tendance à prendre cette règle un peu trop au pied de la lettre dans certains manuscrits… Eh oui, parfois il vaut mieux appliquer le Tell Don’t Show, et ça on en parle beaucoup moins souvent !

LE DANGEREUX SHOW DON’T TELL

Le Show Don’t Tell est souvent cité comme la règle numéro 1 d’écriture – celle qui ne peut qu’améliorer notre façon de raconter. À force de l’utiliser dans mes romans et d’observer son exécution ailleurs, j’ai remarqué que ce n’est pas toujours le cas. Parfois, dire, c’est mieux que montrer. Mais quand peut-on déroger à cette règle sacrée ?

Ce n’est pas utile !

Le rôle d’une histoire n’est pas toujours d’embarquer le lecteur dans une tornade d’émotions. Parfois, il a juste besoin de comprendre ce qui se passe. N’oublions pas que l’information peut être véhicule d’émotions ! C’est même la preuve d’un bon scénario quand celui-ci, seul, suffit à nous emporter. En est un bon exemple la “révélation” : quand arrive un retournement de situation imprévu, l’effet émotionnel vient essentiellement de la transmission d’une information : “La forêt était en feu” peut avoir plus d’impact qu’un paragraphe décrivant comment Gandalf sent une odeur de brûlé, puis aperçoit de la lumière au loin, puis sent un souffle de chaleur depuis la fenêtre ouverte, etc.

Ce n’est pas le moment !

“Montrer” fait traîner. Si les personnages sont en pleine course poursuite, est-ce vraiment le temps de s’attarder sur leur moindre ressenti ? N’est-il pas mieux d’offrir au lecteur une vision plus précise de la scène ? Trop se focaliser sur le Show Don’t Tell, c’est le meilleur moyen de transformer une bataille palpitante en un magma d’émotions changeantes au milieu d’un environnement flou. Rappelez-vous comme on aime les plans aériens dans les films lors des batailles épiques ! Il faut faire confiance aux actions elles-mêmes pour transmettre des émotions !

Ce n’est pas le style !

Un outil répandu du Show Don’t Tell est le changement de point de vue, flashback compris. Mais on peut vouloir écrire une histoire avec un seul point de vue et dont l’histoire se déroule sur quelques heures. Le Show Don’t Tell peut, dans certains cas, s’opposer au style, et créer des ruptures de ton qui, même si elles sont bien écrites, vont laisser le lecteur avec un sentiment étrange, comme si elles n’auraient pas dû être là.

Il y aurait encore beaucoup à dire sur cette règle d’écriture, qui peut prendre des formes très diverses selon quel niveau nous intéresse : la phrase, le paragraphe, la scène, l’histoire, les personnages, le thème… Je vais m’arrêter là parce qu’il faut bien s’arrêter un jour, et parce que comme bien souvent dans les questions d’écriture, le plus important est d’y réfléchir par soi-même, sous le prisme de sa propre histoire.

Signature